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Définition et catégories
L’énergie éolienne est utilisée depuis plusieurs siècles sous forme de moulins à vent par exemple. Cependant, les inquiétudes et le débat autour de cette énergie se sont développés avec l’éolien électrique, lancé dans la deuxième moitié du XXe et dont le développement s’accélère aujourd’hui.
Il porte sur plusieurs objets parmi lesquels :
- la pertinence du choix de l’éolien en France ;
- la gestion de l’intermittence de cette énergie ;
- le coût de l’aide à l’éolien et le prix à payer aux producteurs d’énergie éolienne ;
- les problèmes techniques ;
- la qualité environnementale de la structure, le bilan carbone et le démantèlement ;
- le respect des paysages, des sites et des activités ;
- les nuisances, bruits ou encore effets sur la santé.
Seront spécifiquement développés dans cette fiche les débats portant sur les nuisances aux personnes et aux paysages en environnement terrestre.
Le contexte
L’essor des énergies renouvelables
Deux facteurs sont à l’origine de l'essor des renouvelables :
- l’épuisement annoncé des ressources en énergies fossiles et ses conséquences financières et géopolitiques ;
- le quasi-consensus autour de l’effet du rejet des GES sur le réchauffement climatique et donc la recherche d’énergies moins émettrices.
Cela incite de nombreux pays de reconsidérer leur mix-énergétique en favorisant les énergies renouvelables. L’énergie d’origine éolienne sur terre et en mer constitue un axe de développement.
L’impulsion en France et en Europe
Dans les années 1990, la France définit des orientations en faveur du développement durable. Le programme « Eole 2005 » lancé en 1996 a pour objectif de développer l’énergie éolienne. Fin 2008, l’Union européenne se fixe une règle dite des « 3 x 20 » dont un des objectifs est d’amener à l’horizon 2020 à intégrer à sa consommation énergétique finale une part au moins égale à 20 % d’énergies de sources renouvelables (23 % pour la France).
Toujours en 2008, la loi dite « Grenelle I » matérialise les engagements français dans l’éolien avec un objectif d’augmentation de 20 Mtep d’énergies renouvelables d’ici 2020 dont 3,4 et 1,4 pour l’éolien terrestre et en mer. Ce scénario correspond à un total de 19 000 MW sur terre et à 6 000 MW sur mer, soit l'équivalent de près de 9 000 éoliennes au total (il en existait 2 500 en 2010, ce qui suppose d’installer quelque 700 éoliennes par an).
En France, la puissance installée a été multipliée par 5,5 entre fin 2006 et fin 2013. La puissance installée du parc éolien français atteint 8 143 MW (à fin 2013). Ce parc a généré 2,9% de la production électrique française en 2013. Des aides incitatives à l’investissement et à l’exploitation sont mises en place.
Évolution des repères juridiques
- La loi urbanisme et habitat du 2 juillet 2003 prévoit un schéma régional éolien à valeur indicative. L’implantation d’éoliennes d’une hauteur supérieure ou égale à 12 mètres est subordonnée à l’obtention d’un permis de construire.
- La loi du 13 juillet 2005 fixe les orientations de la politique énergétique (POPE) introduit les zones de développement éolien (ZDE) selon plusieurs critères : le potentiel éolien local, les possibilités de raccordement, la protection des paysages, des monuments historiques, des sites remarquables et protégés. Elle dispose que l’exploitant d’une éolienne est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site à la fin de l’exploitation.
- Depuis mai 2010 et l’adoption de la loi Grenelle II, les éoliennes sont soumises au régime d’autorisation des installations classées en plus du simple permis de construire nécessaire actuellement. Une installation doit comporter au minimum cinq mâts (pour limiter le « mitage » des paysages) mais le seuil minimum de puissance à 15 MW a été supprimé. Enfin, une distance minimale de 500 mètres entre éoliennes et habitations est instaurée.
La loi dites « Brottes », entrée en vigueur en avril 2013, supprime le dispositif des ZDE et la règle des 5 mâts jugés trop contraignants pour le développement de la filière éolienne (dont le développement s'est ralenti après 2011).
L'objet du débat
Les éléments sous-jacents
Le débat sur le respect du paysage repose sur l’idée que le paysage est un bien collectif et un bien public : toute personne y a librement accès. Le paysage est aussi à la base du patrimoine national, de son identité et constitue une ressource essentielle pour les régions.
Les réactions « anti-éoliennes » sont également motivées par une autre considération. Même si la plupart des gens reconnaissent le bienfait sociétal des éoliennes, il existe un phénomène de rejet qui n’est pas propre aux éoliennes appelé NIMBY pour Not In My Back Yard, qui signifie « pas dans mon arrière-cour ». Il s’agit d’une position éthique et politique qui consiste à ne pas tolérer de nuisances dans son environnement proche. « Oui, mais pas dans mon jardin ». Cette posture est souvent critiquée car elle peut traduire la volonté de profiter des avancées technologiques sans en subir les nuisances, repoussant ainsi les installations dans le jardin des autres.
Autre élément sous-jacent, le sentiment d’inégalité de traitement entre les promoteurs et les habitants. Certaines lois valables pour les habitations ont été détournées pour l’implantation d’éoliennes. La loi « montagne » de 1985 qui interdit quasiment toute possibilité de construire voire de réhabiliter un simple cabanon isolé n’a toutefois pas été invoquée lorsqu’il s’agissait d’ériger des éoliennes au motif spécieux que ces machines ne constituaient pas des bâtiments. De même, la loi « Littoral » de 1986 qui témoigne également d’un fort volontarisme de protection des sites, renvoie toute construction de nouvelle route à 2 000 m du rivage. Or, des implantations éoliennes ont été autorisées à de plus faibles distances en des lieux où des particuliers ne pourraient faire valoir un droit à construire(1).
Les nuisances pointées par les détracteurs des éoliennes
Le "mitage"du territoire
La loi de 2005 créant les ZDE devait permettre de concentrer le développement d’éoliennes sur le territoire en respectant les paysages. Cependant, le développement s’est fait de manière fractionnée en morceaux distants de quelques kilomètres et parfois sans cohérence avec le potentiel de la région. Alors que la France dispose de trois grandes zones propices à l’installation d’éoliennes (façade Manche et Mer du Nord, front atlantique et zone méditerranéenne), les implantations ont plus rapidement et massivement concerné des régions continentales aux régimes de vents plus irréguliers. A noter, la loi de 2010, contrairement aux précédentes, crée des zones d’implantation contraignantes pour éviter ce phénomène, comme le réclamaient certains détracteurs. La loi d'avril 2013 supprime ces ZDE.
En 2007, l’Académie des Beaux Arts rend un avis défavorable sur le développement de la filière éolienne. Cette préoccupation est relayée en 2008 par l’ancien président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, qui demande un moratoire sur les éoliennes.
Ces réactions se basent sur l’impact visuel des éoliennes(2). Le rapport de M. Daniel Burette de 2004(3) établit que « la perception visuelle d’une éolienne n’est pas une notion subjective, mais parfaitement quantifiable. En pratique, l’impact visuel croit exponentiellement avec la hauteur de l’éolienne. L’impact visuel d’une éolienne de 150 mètres est 300 fois supérieur à celui d’une éolienne de 50 m ». L’impact visuel est de plus renforcé par certains facteurs tels que l’effet d’alignement, alors qu’il est moindre dans le cas de bouquets d’éoliennes répartis sur plusieurs plans et plusieurs niveaux.
Parmi les solutions évoquées par les détracteurs des éoliennes, des réponses particulières peuvent être trouvées « dans des espaces périphériques aux agglomérations ou en milieu industriel : les éoliennes peuvent contribuer à réhabiliter des friches, redonner vie à des ports, ou à équiper des digues en mer »(4). Sont aussi évoqués le regroupement en bouquet ou en trame, la composition en lignes géométriques en liaison avec les éléments du paysage, éviter la juxtaposition des parcs les uns à côté des autres… et surtout la concertation.
Le bruit
La nuisance sonore est un des principaux problèmes évoqués par les réfractaires. Elle est indissociable de la question de la distance d’implantation. Les bruits résultant des éoliennes présentent une caractéristique majeure : leur irrégularité. Ce type d’exposition est donc plus difficile à appréhender que dans des situations plus classiques d’activités industrielles.
En France, en 2006, l’Académie de médecine prône la suspension de toute construction d’éolienne d’une puissance supérieure à 2,5 MW à moins de 1 500 mètres d’un lieu d’habitation : « à des intensités modérées, le bruit peut entraîner des réactions de stress, perturber le sommeil et retentir sur l’état général ». Par contre, elle estime que la production d'infrasons par les éoliennes est sans danger pour l'homme et qu'il n'y a pas de risques avérés de stimulation visuelle stroboscopique par la rotation des pales des éoliennes.
La même année, les députés Christian Bataille et Claude Birraux, membres de l'Office Parlementaire des Choix Scientifiques et Technologiques, affirment dans leur rapport(5) que pour les éoliennes modernes, dont les pales tournent à faible vitesse, le bruit de souffle des rotors n'est que de 100 décibels en pied de mât et inaudible à 200 mètres.
Profitant de la sortie de ces publications, le Syndicat des Energies Renouvelables (SER) rappelle qu’au niveau du rotor, le niveau de bruit est proche de 100 décibels et qu’au pied d'une éolienne, le niveau sonore s'élève à 55 décibels. À 500 mètres, il est réduit à 35 décibels, soit le bruit d'une conversation à voix basse.
L’Agence française de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail (AFSSET), publie un rapport en 2008 récusant toute distance minimale d’installation vis-à-vis des habitations. Elle opte pour un traitement au « cas pas cas » de la question du bruit. Selon elle, la gêne existe mais n’est expliquée que très partiellement par les facteurs acoustiques (environ 30 à 40%), les effets non auditifs envisageables sont essentiellement d’ordre psychologique.
En 2010, la distance de 500 mètres est imposée et les émissions sonores des parcs éoliens sont soumises à la réglementation des bruits de voisinage (décret du 18 avril 1995 et circulaire du 27 février 1996). L'émergence maximale tolérée, quelle que soit l'origine du bruit, est de 3 décibels la nuit et de 5 décibels le jour à l'extérieur.
L’influence sur la faune
Dernier objet du débat, le risque pour la faune. Plusieurs études, y compris menées par la Ligue de protection des oiseaux, montrent que le nombre d'oiseaux tués par les éoliennes est négligeable par rapport au nombre qui meurt en raison d'autres activités humaines. Selon l’Ademe, le taux de collision se situe entre 0,4 et 1,3 oiseau tué par éolienne par an, « ce qui est sans commune mesure avec la mortalité liée à la circulation routière, aux lignes électriques ou encore aux baies vitrées » rappelle l’agence. De plus, les oiseaux migrateurs s'adapteraient aux obstacles et seraient capables d'éviter les pales. Les études montrent cependant des risques notamment pour les chauves-souris spécialement dans le cas des plus grandes installations(6).
L’étude d’impact comporte une importante phase d’observation des espèces présentes et de leur couloir de déplacements (nidification, zone de chasse, migration pré-nuptiale, migration post-nuptiale, grottes et cavités pour les chauves-souris). Les résultats conditionnent l’implantation du parc.
Le facteur modérateur
L’implication de la population
La consultation de la population est réalisée lors de l’étude d’impact imposée par la demande du permis de construire. Outre l’objectif d’éclairer l’autorité administrative sur les décisions à prendre, l’étude vise aussi à informer le public et le faire participer.
Ex : comités de suivi, permanences en mairie, communication dans les bulletins municipaux, organisation de visites, sensibilisation à la contribution de l’éolien au regard de la consommation.
Réalisée pendant toute la vie du projet, la concertation doit permettre de réduire les divergences.