À l'heure où de nouveaux projets éoliens pointent le bout de leur nez aux Vastres et à Saint-Jean-de-Nay (et il y en aura d'autres, à n'en pas douter), enfilons le costume de Don Quichotte et partons à l'assaut de ces moulins à vent 2.0.
Des grandes marguerites… très polluantes
Il y a d'abord l'argument écologique. Les décideurs de tous bords y sont généralement peu sensibles, le lien viscéral qui nous unit à Dame Nature semblant définitivement perdu. Or, la fabrication de ces mastodontes de métal, comme tous les autres objets high-tech qui peuplent désormais notre quotidien, requiert des "terres rares", des métaux dont l'extraction, souvent dans des pays pauvres, est extrêmement polluante, et dont le recyclage est rendu difficile par la miniaturisation. Rappelons également que chaque éolienne repose sur un socle de béton pesant jusqu'à 2 000 tonnes (un jour, l'Homme respectera aussi les sols).
Industrialisation des paysages
Vient ensuite l'impact visuel. De loin, le Mézenc, scarifié par les éoliennes de Freycenet, n'est plus tout à fait le Mézenc. Un des arguments les plus audibles par les décideurs politiques est d'ailleurs celui du tourisme. Les vacanciers veulent une vraie nature sauvage et font de plus en plus souvent la moue devant l'industrialisation galopante des paysages. Il n'est qu'à voir une ferme moderne (pardon, une "exploitation agricole", le terme "exploitation" étant ici révélateur de notre époque prédatrice) pour en avoir une idée. Les stabulations qui trônent orgueilleusement sur les crêtes du département, visibles à des kilomètres à la ronde, ne sont-elles pas, comme les éoliennes, le pendant campagnard des usines de la ville ?
Cette incidence sur le tourisme sera d'autant plus négative que les projets de parcs éoliens se multiplieront. Il y a quelques années encore, le catalogue national d'une célèbre chaîne de villages de vacances représentée en Haute-Loire étalait fièrement sur sa couverture un chapelet d'éoliennes. Ça faisait tendance, ça faisait moderne, ça faisait dans le vent. Du jour au lendemain, les éoliennes ont disparu du catalogue. Les retours des vacanciers, lassés d'en voir dans chaque région où ils allaient, étaient trop mauvais.
Une "pale de Damoclès" sur les rapaces
L'impact sur les oiseaux et les chauves-souris est attesté. En Espagne, où des études poussées ont été menées, ce sont des milliers d'oiseaux, notamment des rapaces, qui se font hacher chaque année par les pales des éoliennes. Sur les hauts plateaux altiligériens, où nous avons la chance d'avoir encore des grands rapaces -- dont le circaète Jean-le-Blanc, l'aigle royal, le vautour moine, le vautour fauve, et même l'étonnant gypaète barbu de temps à autre -- l'implantation de parcs éoliens ne peut qu'inspirer l'inquiétude.
On pourrait encore citer les conflits d'intérêts et autres affaires de gros sous, la consommation électrique de ces grosses machines, le marketing opaque des promoteurs, les ondes et les décibels… Mais en réalité, tous ces arguments sont secondaires. Si l'éolien industriel n'a pas sa place, en Haute-Loire ni ailleurs, c'est parce qu'il n'a aucune utilité véritable. Il n'est qu'une vitrine, un alibi pour continuer à consommer sans entraves. Comme le solaire, il n'est que le symbole ultime (car prétendument "vert") d'un modèle ivre de croissance et de technologie, mais au fond obsolète et vide de sens, un modèle dont nous observons chaque jour un peu plus les effets délétères, sur le climat, sur la santé, sur la biodiversité.
Place à la non-consommation !
Mais alors, que faire ? Dans une chronique récente,
nous évoquions la permaculture, dont l'un des principes de base est le "non-agir" : si l'écosystème du jardin est riche et diversifié comme il devrait l'être, il se régulera de lui-même. De la même manière, un des
principes élémentaires du Zéro Déchet est la "non-consommation" : ai-je réellement besoin de ce produit ? La plupart du temps, la réponse est non. C'est un raisonnement que l'on peut transposer à l'énergie : ai-je besoin d'allumer la lumière quand il fait jour, de laisser l'ordinateur en veille, ai-je vraiment besoin de cette enceinte nomade, de ce jouet connecté, de ce vélo électrique, de cette tablette numérique, de ce gadget à durée de vie ultra-limitée que je vais devoir recharger à tout bout de champ ? Comme en permaculture, comme pour les déchets, comme pour de nombreux maux de cette société, la solution se trouve dans la sobriété et donc, parfois (horreur !), dans le renoncement au sacro-saint "progrès"…
Oumpah-Pah