La fronde contre les installations éoliennes prend de l'ampleur en France. En cause, les nuisances visuelles, sonores, électromagnétiques, voire une dépréciation des habitations situées à proximité.
Le rejet est massif. Sept projets d'installations d'éoliennes sur dix font aujourd'hui l'objet d'un recours des riverains, selon le rapporteur d'un projet de décret visant à accélérer les procédures devant la justice administrative. Des contestations qui allongent les constructions de 7 à 9 ans. A Vermelles, dans le Pas-de-Calais, comme dans beaucoup de communes hexagonales, les oppositions se multiplient. Depuis cinq ans, la commune se bat contre le projet d'installations d'un parc. En décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a, rapportait La Voix du Nord, tranché en faveur de la société promotrice du parc.
Les opposants, dont Alain de Carrion, le maire de cette bourgade d'un peu plus de 4.000 habitants, ne baissent pourtant pas les bras. "Je considère qu'il y a des endroits adaptés pour ça et ici, ça ne l'est pas", tranche l'édile. "Déjà, on parle du principe de précaution pour la santé, de la l'influence sur la faune et la flore, du fait que notre territoire est un territoire de mémoire (important cimetière militaire de la 1re Guerre mondiale, NDLR)", argumente-t-il encore. "Les habitations sont à 700 mètres", s'indigne Grégory François, riverain d'Auchy-les-Mines et chef de file de l'opposition au projet. Pour lui, la réduction du nombre de turbines prévues à cet endroit est encore insuffisante. En plus des nuisances, il pointe aussi une possible dépréciation des biens immobiliers situés aux alentours. "Qui achètera une maison avec une éolienne qui se voit du jardin?", s'interroge-t-il.
Quels troubles sur la santé?
Si l'impact visuel est indéniable, les troubles de santé auditif ou nerveux engendrés par les éoliennes sont pourtant moins évidents. Tant pour ce qui concerne les problèmes d'acouphènes, les pertes auditives, ou des perturbations résultant des infrasons, l'Anses a conclu dans un rapport de 2017 "que si les éoliennes sont des sources d’infrasons et de bases fréquences sonores, aucun dépassement des seuils d’audibilité dans les domaines des infrasons et basses fréquences jusqu’à 50HZ n’a été constaté".
De nombreux témoignages de riverains contredisent cette version. Ils font état de fatigue, de troubles du sommeil, d'inflammation des articulations, de crises d'épilepsie... L'académie de médecine regroupe ces maux sous l'expression de "syndrome des éoliennes" et y voit surtout la marque d'une subjectivité. Si les troubles visuels et sonores sont reconnus, ils ne seraient cependant pas de nature à provoquer de quelconques pathologies. Le débat n'est pas encore tranché dans un sens, ni dans l'autre en l'absence de consensus scientifique, notamment concernant le problème des infrasons.
"Foutez-nous la paix avec les éoliennes"
Des politiques, comme Xavier Bertrand, Président du conseil régional des Hauts-de-France, ont également un avis catégorique sur le problème. "Foutez-nous la paix avec les éoliennes", déclarait-il mardi sur BFMTV. "C'est en train de détruire nos paysages et le gouvernement laisse faire. Les Hauts-de-France sont la première région productrice d'énergie éolienne. C'est un record dont je me passerais bien. (...) Je dis au gouvernement: 'Il y en a marre'. (...) Soixante-dix pour cent de recours contre les projets éoliens ça veut bien dire quelque chose. Je dis au gouvernement: 'On arrête l'éolien, laissez-nous développer le solaire et la méthanisation, vos kilowatts en énergie renouvelable, on vous les propose, mais autrement."
Reste la question de l'éolien en mer. "Quand il est très au loin des côtes, il ne gêne ni le tourisme, ni les flux commerciaux, ni les pêcheurs. Dans ces conditions-là, les choses se regardent mais pas aux tarifs qui sont proposés. Mais les promoteurs pour ce faire plus d'argent, que font-ils? Eh bien, ils voulaient mettre tout près des côtes et l'avis des élus, l'avis des populations, ils s'en foutent", lâche-t-il. Selon EDF, l'éolien représente (production de 2014) 5,7% de la production totale d'énergie électrique. Et 77% pour le nucléaire. La France se classe au 7e rang mondial et au 4e européen sur cette énergie, derrière la Chine, les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Inde, l'Espagne, le Royaume-Uni. Dans les Hauts-de-France, quelque 9,5% de la consommation d'électricité était en 2016 couverte par l'énergie éolienne, juste derrière la région Grand-Est avec 10,7%. Suivent le Centre-Val-de-Loire (8,7%), et la Bretagne (6,6%). La fronde antiéolienne ne semble pour autant pas corrélée à ces chiffres, mais à des conflits locaux. Ainsi en juin dernier, deux éoliennes ont été incendiées en dans la Drôme, alors qu'en Auvergne-Rhône-Alpes, la part énergétique de l'éolien est de 1,3%.