À l’heure ou notre Président annonce vouloir rendre la transition écologique « acceptable et démocratique » (voir ici), un retour sur la consultation publique organisée autour du décret éolien (dit aussi décret Lecornu), destiné à « lever les freins » dans ce domaine, est nécessaire…
Rappelons que ce texte prévoit notamment de supprimer un degré de juridiction en portant les contentieux éoliens directement devant la Cour d’Appel et de « cristalliser les moyens » du demandeur deux mois après la communication du premier mémoire en défense, c’est-à-dire de limiter le temps utile aux requérants pour rassembler leurs arguments. Ces mesures seraient complétées par une réduction des délais d’instruction, par l’adoption du principe de « silence vaut accord » (consentement tacite de l’administration) et autres « simplifications » administratives (voir ici)… Ces mesures liberticides s’ajoutent à l’interdiction pour les associations créées depuis moins d’un an d’agir en justice contre une décision relative à l’utilisation des sols (voir ici).
La consultation publique, tenue en février 2018, relative au projet de décret sur les éoliennes terrestres et portant diverses dispositions de simplification et clarification du droit de l’environnement appartient à cette catégorie de consultation.
2778 contributions ont été reçues dans ce cadre, dont 45 portaient sur des dispositions non spécifiques à l’éolien terrestre. Ces dernières ont ainsi été rejetées, alors que certaines étaient profondes et auraient méritées d’être retenues. Ainsi de la remise en cause du « silence vaut accord » en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE).
Il est ensuite relevé que 95 % des avis exprimés sont défavorables au projet de décret. Parmi eux, 2/3 remettent en cause le développement de l’éolien en France en raison de son intermittence, de son coût, de son système de subvention ou en raison des nuisances qu’il occasionnerait (bruit, atteintes aux paysages, à la biodiversité, etc.) L’on comprend alors que ces avis, non expressément rattachés selon la synthèse des observations à l’objet formel de la consultation, ne seront pas retenus. En effet, son rédacteur considère que « ce n’est pas l’objet du décret qui tend à faciliter et raccourcir les procédures » .
Plus étonnant encore, certaines dispositions font l’objet de la simple mention d’un « Maintien », sans autre forme de procès, autrement dit sans justification juridique ni technique : ainsi du refus, exprimé par une probable grande majorité des avis exprimés (pas de chiffre), de la suppression d’un degré de juridiction ou de la cristallisation des moyens…
Décret éolien, motifs de rejet des observations du public. Voir ici |
Il est en définitive avéré que cette consultation publique a été de pure forme et que les citoyens qui y ont pris part ont été, dans une certaine mesure, abusés. Ce qui justifie notamment le dépôt de plainte devant la Commission Européenne réalisé par Sites & Monuments et trois autres grandes organisations nationales au printemps 2018.
Devant cette procédure biaisée, Sites & Monuments demande que l’on en revienne à de véritables consultations publiques et que les représentants de la société civile soient officiellement consultés. En l’espèce, les associations nationales de protection du patrimoine, des paysages et de l’environnement.
Bruno Ladsous, membre du groupe éolien de Sites & Monuments
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