Témoignage d’Eliane Chalier, Col de La Fageole, (Cantal, 15)
Nous habitons au col de la Fageole, dans le Cantal, à plus de 1000 mètres d’altitudes, en pleine nature. Mon mari et moi étions agriculteurs. L’un de nos deux fils a repris l’exploitation. Notre second élève des chevaux, de magnifiques anglo-arabes.
Les premières éoliennes ont été installées à 700 mètres de chez nous, elles cernent notre maison sur la droite et longent nos terrains. Nous n’avons pas accepté ces usines sur nos terres, pourtant nous en subissons toutes les conséquences. Mon mari est cardiaque, équipé d’une pile-défibrillateur. Le médecin lui a interdit de s’approcher des aérogénérateurs. D’ailleurs, le danger est clairement indiqué sur les mâts. Il lui est désormais impossible d’aller inspecter nos prés et nos clôtures, car notre propriété jouxte ces usines ! Cet avertissement revient à nous interdire de circuler librement chez nous.
Lorsque nos enfants doivent travailler sous les mâts, pour faire les foins ou s’occuper des pâtures, ils reviennent systématiquement avec un horrible mal de tête.
A l’intérieur comme à l’extérieur, le bruit est devenu infernal, un peu comme si un camion était garé en permanence dans notre salon lorsqu’il y a du vent. Les jours de givres, l’intensité sonore est encore plus forte.
Le soir, lorsque les mâts clignotent, nous devons impérativement fermer tous les volets pour que la vie soit supportable, mais le jour, et surtout l’été, nous ne pouvons pas nous protéger des pales qui passent par intermittence devant le soleil en provoquant un effet stroboscopique intolérable, comme si un néon clignotant avait été installé dans le ciel. Il nous est impossible d’ouvrir les rideaux, ou de rester sous la véranda.
Bien sûr, nos bêtes sont perturbées, elles refusent de s’approcher des machines et de brouter sur nos prés les plus proches. Au printemps, lorsque notre fils y installe ses chevaux, on peut observer à quel point ils sont énervés et instables. Ils se comportent de la même façon que les vaches, en évitant de se diriger vers l’herbe haute et appétissante car il faut se tenir près des éoliennes.
Des machines plus puissantes vont être installées. Nous n’avons pas notre mot à dire.
Nos montagnes sont peu à peu transformées en zones industrielles sans que nous puissions faire quoi que ce soit.
Témoignage recueilli par Sioux Berger/ Mars 2023
En savoir plus : Le Prix du Vent, Sioux Berger, Editions du Rocher / Les Pentes, Sioux Berger, Editions De Borée.