Nous possédons une exploitation de 350 bêtes sur 135 hectares. Nous avons un atelier lait, en race normande, et des vaches charolaises pour la viande.
En 2006, un promoteur éolien est venu nous proposer de louer une partie de nos terres pour y installer des éoliennes. Comme à l’époque on disait avant tout que c’était écologique et sans danger, on a accepté sans hésiter d’en prendre une, et ça nous faisait un revenu complémentaire. Autour de notre ferme, on se retrouve au total avec un parc de 8 éoliennes de 150 mètres de haut dont 6 sont à 720 mètres de notre habitation, les deux autres à environ 1 km.
On s’attendait peut-être à un peu de bruit, ou à ce que ça ne fasse pas très joli dans le paysage, mais on ne s’attendait pas perdre 50 bêtes par an, depuis que les éoliennes sont là.
Au début, on n’a pas fait vraiment le lien. On a pensé à un problème sanitaire : dans l’élevage, on peut s’attendre à tout. On a fait venir des spécialistes (vétérinaires, nutritionnistes) : mais ils n’ont rien trouvé. Pourtant, nos veaux meurent, la qualité et la quantité de notre lait est catastrophique. On a déjà eu 4 menaces d’arrêt de collecte.
Alors, comme on ne trouvait rien, et que nos vaches continuaient à refuser d’entrer dans le bâtiment quand les éoliennes étaient en fonctionnement, on a appelé le promoteur. Un actionnaire du Luxembourg est venu sur notre exploitation. Il ne nous a pas vraiment pris au sérieux : il a envoyé un geobiologue en pensant résoudre le problème mais celui-ci n'a pas réussi et n'a rien arrangé. Nous avons donc déposé une plainte à la préfecture, ce qui a déclenché une étude GPSE (Groupement Permanent de Sécurité Electrique), et l’envoi d’un expert. Dans le cadre du GPSE des expertises scientifiques ont été réalisées nous avons signé un protocole.
Voilà pour l’instant où on en est : il y a des failles rocheuses et de l’eau sous notre bâtiment. Je vais essayer d’expliquer simplement pour que les gens comprennent : en gros, les câbles électriques qui récupèrent l’électricité de l’éolienne passent sous la terre. Cette électricité, quand il y en a trop les jours où ça tourne à plein régime, on ne sait pas la stocker. Alors le surplus, il part dans la terre. Et il vient se « mélanger » avec l’eau des nappes phréatiques. Pour faire simple, nos vaches ont 4 pattes, et elles se prennent des décharges en permanence. Les veaux sont les plus fragiles. On a beaucoup de morts subites. Nous avons d’ailleurs décidé de condamner certaines zones de notre bâtiment, celles où les veaux tombaient malades. C’est tout ce qu’on a pu faire.
Avec le GPSE, comme nous avons signé un protocole, pendant les études nous n’avions pas le droit de divulguer quoi que ce soit à la presse pendant une durée de un an. Les documents étaient estampillés « confidentiel ». Mais à présent, nous pouvons parler librement, et nous n’avons plus rien à perdre. Le géobiologue nous a conseillé, pour notre santé, de nous éloigner de notre élevage. Mais comment voulez-vous qu’on fasse ? On vit là, on travaille là, et on prend seulement une semaine de vacances par an. De temps en temps, je me rends chez mes parents, pour faire une pause. On ressent une fatigue extrême je multiplie les crises d’épilepsie, les chutes inexpliquées.
Nos enfants ne sont plus à la maison en permanence, Dieu merci. Mais quand ils viennent nous voir ils nous disent à chaque fois… » Mais comment faites-vous pour tenir dans cet enfer, avec ces maux de tête, cette fatigue ? »
On n’est pas les seuls dans le secteur à souffrir de tous ces maux : Céline Bouvet a une exploitation pas loin, et elle vit exactement la même chose. Ce qui est curieux, c’est que, quand on essaie de parler à la presse, c’est comme si on parlait dans le vide. C’est un scandale, et personne ne le dénonce !
Actuellement, les expertises se poursuivent pour compléter celles qui ont été faites par le GPSE. C’est l’Etat qui a mandaté ces nouvelles expertises. Ils vont percer des trous partout dans nos parcelles Un des experts a fait de l’humour un jour et il nous a dit « mettez des bottes en caoutchouc à vos bêtes pour les isoler ! »
Je joins à mon témoignage des documents, pour les plus sceptiques, et notamment une expertise qui analyse le rendement de notre robot de traite.
Voici la conclusion : « on constate une amélioration des performances de l’élevage et du comportement des animaux au cours de l’arrêt des éoliennes, avec une dégradation rapide lors de la remise en service du parc éolien ».
Faites circuler notre témoignage. Les Français doivent savoir ce qu’on leur cache.
Les éoliennes nous électrocutent à petit feu.
Témoignage recueilli par Sioux Berger
Même combat pour des agriculteurs à Conquereuil (44) (V&T)